mardi 24 février 2009

Je m’assis et nous parlions de tout et de rien, lorsque la serveuse m’apporta l’omelette, je m’aperçut que certains plats étaient servis individuellement, je compris qu’il était dangereux pour moi de les manger. Je remerciai et cherchai le moyen de jeter l’omelette discrètement. Je fis semblant de tomber sur ma voisine d’en face et profitai pour faire tomber l’assiette. La serveuse revint ramasser les morceaux, je m’excusai auprès d’elle :
Excusez ma maladresse, ce soir je n’ai pas trop faim, je crois que ça ira !
Elle n’insista pas. Je ne parlai surtout pas de l’incident mais la peur me tenaillait.
Je ne savais plus en qui avoir confiance, je décidai de ne plus rien confier avant l’arrivée de Chris. Françoise me demanda pour l’omelette :
Tu l’as fait exprès ?
Bien sûr que non, j’ai perdu l’équilibre
Tu m’as fait peur en tombant sur Gisèle !
Je ne l’ai pas blessée c’est le principal, je tombe de sommeil Françoise.
Je me souvins que Michel m’avait écrit, Il se plaisait chez ses grands-parents, je lui manquais et il me demandait quand je voudrais bien le voir. Les larmes coulaient sur mes joues, je ne voyais pas comment lui dire que je ne pouvais pas parler devant lui, il m’a bien fait comprendre que d’autres mamans sont allées en maison de repos, leurs enfants sont venus les voir.
Françoise s’inquiéta :
Non, tu ne vas pas bien, je peux t’aider ?
C’est mon fils, il s’ennuie de moi et je ne peux pas le voir en ce moment
Tu as le droit de le voir dit Françoise contente d’avoir trouvé la solution
Non, je ne peux pas pour le moment, excuse-moi, il faut que je dorme.
Elle n’insista pas et j’éteignis de mon côté, elle lit encore un peu, je n’avais pas envie de parler. Il fallait que je voie un peu plus clair, Chris pourrait-il m’aider de l’extérieur et Michel, comment lui faire comprendre sans l’inquiéter ?

Le matin, je décidai d’éviter de parler aux autres ou le strict minimum. Personne ne dit rien pour Lara retrouvée ficelée dans le corridor avec un drap. J’ignore par qui ou quand elle fut retrouvée ? Je pris ma douche en laissant la porte ouverte, préparai les affaires prévues pour Chris. Nous avions une visite médicale ce matin,
j’avais le cœur qui battait un peu mais le Dr Dupuis, m’a examiné normalement sans faire aucune illusion, il m’a juste dit :
Dans moins d’une semaine on vous enlèvera le plâtre, ensuite il faudra nager pour guérir plus vite
Vous avez une piscine dis-je interloquée ?
Oui, elle se trouve dans la propriété d’en face, elle nous appartient mais à part la piscine nous n’y allons pas – Vous pouvez partir, tout est normal !
Je le saluai et partis. J’étais étonnée de ne voir nulle part, une mention concernant la piscine, il fallait que je me renseigne. Je passai voir Mlle Viollet et lui demandai :
Il y a des pensionnaires qui vont à la piscine en ce moment ?
Il y en a tous les jours, pourquoi ?
Bientôt j’en ferai m’a dit le docteur, je voulais savoir si je pouvais être seule ou pas, c’est mieux d’aller à plusieurs !
Il y a un kinésithérapeute, vous ne serez jamais seule. Elle ajouta – Les personnes vont à tour de rôle car chaque cas est différent, pour le dos on ne fait pas les mouvements pareils que pour votre pied.
Chacune de nous a un kiné pour elle seule ? Elle rit pour la première fois et ajouta :
Dans la journée, il y a plusieurs personnes qui y vont à tour de rôle mais parfois ensemble, si le cas est semblable. Il se trouve que nous n’avons qu‘une fracture du calcanéum en ce moment et c’est vous. Cela est plus clair ?
Merci, j’ai compris.
Je la quittai après un beau sourire, et allai déjeuner. Personne ne fit allusion à Lara, mais je sentais une certaine tension à la table.
Je demandai à Sylvie si tout allait bien dans le hall, elle me répondit :
Nous ne savons pas qui a trouvé Lara, je crains les représailles
Je te comprends, je vois mon mari cet après-midi et te tiendrai au courant si j’ai du nouveau – Au fait tu savais qu’en face il y a une piscine qui appartient à la maison de repos ?
Non, comment le sais-tu ?
C’est le Dr Dupuis qui me l’a dit ce matin, j’aimerai savoir qui y va ?
Tu passes une annonce, ce n’est pas un acte dangereux. Elle rit, je ne dis rien mais je réfléchis, je décidai de donner un petit papier sur chaque table en demandant « prévenez-moi si vous allez à la piscine svp » ainsi je saurai si je suis seule ou si nous sommes plusieurs !
Midi est vite arrivé, Françoise me sentait distante mais ne comprenait pas la raison, je l’étais avec tout le monde, m a méfiance était valable pour tous.
Je regardai les tables, je ne vis pas de papiers, mais à une table une jeune femme s’est approchée en me demandant :
Vous êtes Armelle ?
En effet !
Je vais à la piscine depuis une semaine, je crois que vous vouliez le savoir ?
Merci, j’y vais dans une semaine, vous serez encore là ?
En principe oui, j’ai une rééducation de deux mois, nous sommes une douzaine à en faire. Pas en même temps, j’en rencontre une autre, à l’autre table là-bas, la femme qui lit votre papier. Je la vis et souris, elle me regardait, et faisait signe qu’elle y allait aussi. Je demandai à ma voisine de table son nom, elle connaissait le mien :
Je m’appelle Gisèle, pas très joli comme prénom, je ne l’ai pas choisi !
Elle avait un nez en trompette et des yeux rieurs, je la trouvai sympathique. Le moral revenait ! Marie me demanda où se trouvait la piscine, je lui expliquai, Françoise parut étonnée également :
Personne n’en a parlé de la piscine dit Françoise ?
Justement, elle m’intrigue dis-je puis, je mangeai sans un mot.
En voulant remonter, je me rendis compte que mon estomac était aussi lourd que si j’avais avalé du plomb, les douleurs étaient intenables, je ne pouvais pas attendre dans cet état, je réussis à aller jusqu’à l’infirmerie, il n’y avait personne. La porte était ouverte, j’appelai Mlle Viollet puis, je m’enhardis et entrai, je regardai si je trouve du spasfon. A ce moment l’infirmière entra en colère :
Que faites vous-là ?
J’aimerai un cachet de spasfon j’ai très mal au ventre lui dis-je piteusement
Elle prit un cachet, me le donna avec un verre d’eau, j’avalai le cachet et la remerciai, en voulant sortir, je sentis que je m’évanouissais.
Je me retrouvai couchée à l’infirmerie, Mlle Violet me demandait si j’allais mieux :
Un peu, il faut que je me lève, mon mari va m’attendre
Il viendra ici, pas longtemps puisque vous vous êtes évanouie, il faut voir pourquoi vous avez aussi mal, le docteur vous verra demain.
En attendant, vous êtes en surveillance médicale ici.
J’ai failli m’évanouir une seconde fois de colère, je pense à la joie que je me faisais de voir Chris, pouvoir lui parler, là nous ne serons pas libres et ne pourrons échanger que des banalités.

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